Présentation de "Moustique sympathique"

    Conte social autour des échanges « équitables », sous forme d’album jeunesse. Illustratrice proposée : Fanny Bompas). 

 

    Zina, une femelle moustique, ne veut plus jouer les petits vampires, ne plus tirer profit des pauvres gens… Contre l’avis de ses consœurs, elle décide un jour de changer sa vie. Mais le chemin qui mène vers le changement de comportement est parfois semé d’obstacles. Zina pourra-t-elle se passer de sang durablement ? Réussira-t-elle à trouver des amis prêts à l’écouter et à l’encourager ?

 

    Un album haut en couleur et en fraternité qui vous mènera vers « Le Village Planétaire du Partage ». À lire en famille.

 

 

Extraits protégés

    Nous allons vous raconter l’histoire d’un insecte dont vous avez eu sans doute la fâcheuse ou l’agaçante visite en période estivale. Nous voulons parler du moustique, plus précisément de la donzelle moustique que nous appelleront pour cette histoire - il faut bien de temps en temps prendre quelques libertés avec la langue française - non pas le moustique mais « la moustique ».

 

    Un, deux, trois… ouvrons la moustiquaire ! Euh, nous voulons dire ouvrons les rideaux de notre récit…

 

    Il était une fois, dans les contrées asiatiques lointaines, une moustique, appelée Zina, qui passait de longues heures aux abords des rizières à vampiriser les animaux de tout poil et les êtres humains, profitant essentiellement de la nuit pour s’approcher en susurrant de ses victimes endormies. Prélevant çà et là, avec son suçoir, le sang sucré et chaud, elle s’enrichissait surtout au dépens des plus faibles, ceux qui n’avaient pas les moyens de se protéger des assauts par l’achat d’une moustiquaire, de citronnelle ou de tout autre chose.

 

    Un jour, notre moustique repue et savourant ses richesses agglutinées, décida de se reposer sur une couche confortable pour savourer les projets qu’elle mettrait bientôt en place : des marais comme des palais et des milliers d’humains, adultes et enfants, qui lui seraient dévoués corps et âme. Elle eut à peine le temps de fermer les yeux que soudain un cauchemar épouvantable s’imposa en elle. Elle se vit au banc des accusés devant le tribunal des insectes qui lui reprochait de n’avoir travaillé que pour profiter des plus faibles, d’avoir accumulé des richesses sur le dos des autres. Les jours suivants, le même mauvais rêve, insupportable de vérité, revint. Zina, tordue de douleurs et de remords, prit conscience que sa trompe la trompait et que le vrai bonheur n’est pas dans l’exploitation des êtres sans défense. Elle se résigna bientôt à changer le sens de sa vie, quitte à vivre moins dans le luxe et l’abondance, et en informa aussitôt ses amis :

 

    «  C’en est assez ! tempêta-t-elle de sa voix zézayante. Ze ne peut plus vivre comme zà. Zai trop zoué les parasites. Ze me suis trop rassasiée sur la peau des pauvres zens.

    - Mais c’est tout à fait normal pour « une moustique », reprit l’une de ses consœurs.

    - Désormais, ze ne veux plus être un insecte impitoyable qui zuce de pleins sacs de zang frais. C’est sûr, ze me suis enrichie grâce à ces circuits sanguins  mais zà présent, zai soif d’autre zose, ze veux rechercher… des zhorizons plus justes…

  - Lesquels ? interrogea non sans surprise une autre copine.

 

    La moustique répondit qu’elle voulait découvrir les « chemins de la sazesse ». Ses compagnes de toujours ne comprirent pas cette décision aussi étonnante que soudaine. Zina s’était le long des jours et surtout des nuits taillée une part belle de globules rouges. Comment pouvait-elle être prise de ce mal étrange, le remords ? Comment pouvait-elle, elle une moustique destinée à piquer, se sentir subitement aspirée ( siurp ! ) ailleurs ?

 

« Mais quelle mouche t’a piquée ? répétaient toutes les demoiselles moustiques.

- Aucune, reprit-elle. Ze veux simplement chanzer ma vie, me métamorphoser comme font certains zinsectes, devenir enfin une « moustique mystique », un insecte rêvant de découvrir la face cachée des choses. Oui, une « moustique mystique » et tant pis si ça vous « zêne ».

- Mais tu es folle ou tu es saoule ? s’interrogèrent encore ses copines.

 

    Zina les regarda en souriant et pointant son dard vers le zénith, elle ajouta :

 

    «  Les deux zà la fois. Folle d’absolu. Folle oui et saoule de vos conseils, saoule de vous entendre zanter la même zanson ! Zeu, zeu, zeu.. Moi désormais, ze dézire autre zose qu’être une drôle de « loustique » de votre zenre. »

 

Ses consœurs restèrent sidérées ; Zina leur avait - comme qui dirait - cloué le dard.

 

Le jour suivant, elle prépara ses affaires, pas grand chose au fond : des jumelles, une boussole et une brosse à dard. Aussitôt équipée, elle décolla de la rizière rouge. Ses copines secouèrent leur mouchoir en guise d’adieu et Zina s’envola, laissant derrière elle tout ce passé qu’elle maudissait. Elle s’éloigna des siens, peut-être à jamais. Elle s’isolait ainsi, ciselant le ciel de ses deux ailes légères : zou… zou … zou…

 

    Elle survola différents pays pendant des jours et des nuits. Dans les régions tropicales, elle ne s’attarda pas beaucoup, pas plus chez sa cousine l’anophèle, responsable de cette terrible maladie qu’est le paludisme, que chez la stégomyie, autre moustique qui propage, par ses piqûres, la fièvre jaune. Non vraiment, ce  n’était pas des fréquentations qu’il fallait conserver pour atteindre les chemins de la sagesse. Zina se dirigea en direction de la mer Méditerranée.